La croix ansée, signe de vie éternelle
La résurrection d'Osiris
Passé dans le royaume des morts, Osiris fut alors embaumé
au son des Lamentations d'Isis et de Nephtys.
Isis inventa ainsi le "remède qui donne l'immortalité".
Avec Nephthys, Thot et Anubis, elle disposa les restes d'Osiris et les transforma
en une momie impérissable, capable de supporter éternellement
l'âme de ce dieu. Car Anubis le chacal avait depuis longtemps déjà
la science mystérieuse qui assure la persistance infinie de la chair.
Pourtant il ne réussissait à obtenir qu'un corps desséché,
immobile et glacé, que le Double ne pouvait ni soulever ni faire remuer
et qui le condamnait à mener une existence ténébreuse.
Thot et Isis voulurent qu'Osiris fût plus favorisé. Ils ajoutèrent
cette fois à la préparation de la momie des rites magiques qui
devaient procurer à la chair desséchée une nouvelle existence.
Et voici comment ils s'y prirent.
Isis avait, au moment de ses trouvailles, revivifié l'un après
l'autre chacun des membres du dieu mutilé. Elle enveloppa ces membres
dans une figure faite de cire et d'aromates, et de terre mélangée
de blé, et d'encens, et de pierres précieuses, de la grandeur
d'Osiris et faite à sa ressemblance. Ensuite, elle fit sur cette figure
des opérations magiques. Et Isis et Nephthys lui dirent :
"Tu as repris ta tête, tu as resserré tes chairs, on t'a rendu
tes veines, tu as rassemblé tes membres ".
Et Sibou, le père d'Osiris, présidait la cérémonie,
et Râ, du ciel, envoyait les déesses Vautour et Uraeus, celles
qui ceignent comme d'une couronne le front des dieux, mettre en place la tête
d'Osiris et consolider sa nuque.
Et la statue fut revêtue d'un linceul de lin bien ajusté. Alors
Isis et Nephthys, en robes de deuil, les cheveux dénoués, se meurtrissant
la poitrine de coups, se mirent à chanter lamentablement, suppliant Osiris
de revenir habiter sa forme reconstituée.
Isis chanta en embrassant les pieds de la momie :
" Viens vers ta demeure, viens à ta demeure,
Toi qui n'a plus d'ennemis,
O bel adolescent, viens à ta demeure pour que tu me voies.
Je suis ta sœur que tu aimes,
Ne te sépare pas de moi, bel adolescent.
Viens à ta demeure,
Je ne te vois pas et pourtant
Mon cœur aspire à te rejoindre
Et mes yeux te réclament
Je cours de tous côtés pour te voir.
(...)
Cela est merveilleux de te contempler.
(...)
Viens à celle qui t'aime, qui t'aime ô Ounen-Nèfer,
Viens auprès de ta sœur,
Viens auprès de ta femme,
Toi dont le cœur a cessé de battre !
Viens vers la maîtresse de ta maison.
Je suis ta sœur, de la même mère,
Ne t'éloigne pas de moi...
Les dieux et les hommes ont tourné leur visage vers toi
Et tous te pleurent ensemble car ils me voient
Je t'appelle et je pleure si fort
Qu'on l'entend dans le ciel
Mais tu n'entends pas ma voix ?
Je suis la sœur que tu aimais sur terre,
Tu n'aimais aucune autre femme
En dehors de moi, ô mon frère, ô mon frère".
Et Nephtys, penchée sur la tête de la momie, dit à son tour :
"Reviens en cette heure, mon maître, toi qui es parti,
Afin de faire ce qui te plaît, sous les arbres.
Tu as éloigné mon cœur de moi de milliers de mille.
Avec toi seul, je désire faire ce que j'aime !
Si tu vas au pays d'éternité, je t'accompagne,
J'ai peur que mon époux ne me tue.
Y eût-il roi qui, en son temps, fît ainsi ?
Je suis venue pour l'amour de toi.
Tu délivres mon corps de ton amour."
Ils enveloppèrent encore la momie d'un autre linceul de lin qu'ils fixèrent
avec des bandelettes ; puis ils tracèrent sur les bandelettes des figures
sacrées et des formules magiques, ils déposèrent sur les
membres des amulettes recélant des charmes puissants ; ils tracèrent
ensuite sur les planches du cercueil et sur les murs de la chambre mortuaire
les scènes de l'existence terrestre et de la vie d'outre-tombe en chantant
des incantations pour rendre à Osiris l'usage de ses yeux pour voir,
de ses oreilles pour entendre, de sa bouche pour manger et parler, de ses mains
pour agir, de ses jambes pour marcher et ces formules sont écrites dans
"le Livre de l'ouverture de la bouche".
Et ils firent encore autre chose. Ils dressèrent à côté
du cercueil qui contenait la momie une statue faite à la ressemblance
du vivant. Et ils la remirent aux mains des habilleurs qui lui firent subir
une toilette minutieuse, ablutions, fumigations, encensements, onctions du fard,
puis ils revêtirent la statue de bandelettes vertes, rouges, jaunes et
blanches, d'armes et de couronnes. Ensuite, ils firent fabriquer soit en cornaline,
soit en pierreries, soit en or, la croix ansée, signe de vie, les liens
de cou, de poignets, de chevilles, toutes les amulettes destinées à
éloigner Seth l'adversaire et l'ennemi et à le frapper d'impuissance.
Et à la statue aussi ils chantèrent les chants magiques pour ouvrir sa bouche, ses yeux et ses oreilles, pour délier ses bras et ses jambes, pour donner le souffle à son gosier et pour susciter les battements de son coeur. Et les formules qu'ils prononcèrent étaient si puissantes que le double, cette statue à l'image d'Osiris, vit et entendit, parla et mangea, assis devant une table chargée de toutes les choses bonnes et pures que donne le ciel, que crée la terre, que le Nil amène de sa cachette. Et les pains, les viandes, les fruits, les boissons écartent à jamais de lui toute menace de soif ou de faim.
Isis la magicienne alors transformée de nouveau en oiselle battit l'air avec ses ailes pour lui redonner le souffle vital, et ranima son frère-époux. Mais "c'est une chose à garder bien cachée ! qu'il ne soit pas permis qu'un homme ou une femme la divulgue à haute voix !". Puis, grâce à sa magique puissance, elle lui rendit quelques instants son membre disparu et descendit en planant doucement sur le corps d'Osiris qui, revirilisé par cette action, la féconda.
Ressuscité, Osiris aurait pu reprendre sa place parmi les hommes et
quelquefois il lui est arrivé de se montrer à ses fidèles
serviteurs. Mais il ne voulut pas séjourner dans les villes comme l'avaient
fait ses ancêtres. Il préféra la Prairie du repos au milieu
des marais dans les îlots sablonneux à l'abri des inondations du
Nil. Ce fut le premier royaume d'Osiris où il mena une existence toute
semblable à sa vie première, mais sans vieillir jamais.
Là est son royaume éternel. Le soleil et la lune l'éclairent
en même temps. Quand il fait chaud au milieu du jour, le vent du nord
souffle pour rafraîchir l'atmosphère, les moissons y sont abondantes
et magnifiques. Des remparts épais protègent ce séjour
des entreprises de Seth et des esprits malfaisants. Un palais semblable à
celui de Pharaon, mais mille fois plus beau, s'y élève au milieu
de jardins délicieux. Osiris entouré des siens y mène une
vie tranquille où abondent tous les plaisirs de la vie terrestre sans
aucune de ses douleurs.
Cependant Osiris, Ounnefer-le-bon, le type de la bonté parfaite, a voulu
ouvrir les portes de son paradis aux âmes de ses anciens sujets fidèles,
ceux qui sont les suivants d'Horus, afin que ceux qui ont été
bons sur la terre, qui ont compris les enseignements sacrés et qui ont
suivi la voie droite, mènent dans l'autre monde une heureuse existence
et jouissent du bonheur éternel auprès du dieu qu'ils ont adoré
et honoré pendant leur vie humaine. Il prit la croix de la vie, l'Ankh
de la résurrection, et avec elle dans son Ba il alla pour sauver et protéger
tous ceux qui, seuls ou terrifiés, pénétraient dans l'Amenti.
Il leur revint de vivre à l'ouest en attendant ceux qui, déshérités,
sont exilés du règne de la vie.
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