Les maîtres chanteurs de Nuremberg




Orchestre

http://www.loustal.nl/museum211.htm



Les maîtres chanteurs de Nuremberg (Wagner)


La messe est finie à l'Eglise Sainte-Catherine de Nuremberg.
Les fidèles font un dernier signe de croix et s'en vont.
Eva, la fille de l'orfèvre et maître chanteur Veit Pogner,
Et Magdalene, sa dame de compagnie, sortent les dernières.

Le noble Walther von Stoltzing en profite pour les approcher.
Visiblement très amoureux d'Eva, il la dévore des yeux.
La jeune fille rougit et baisse la tête.
" Mon père veut me faire épouser le lauréat du concours poétique et musical,
Qui se déroulera demain, murmure-t-elle tracassée.
- Je ferai tout pour gagner cette compétition !
Réplique aussitôt le jeune homme, plein de flammes.
- Ce n'est pas si simple ! dit Eva.
Les règles en sont compliquées et les juges sévères. "

Pendant ce temps, les maîtres chanteurs, tous commerçants de la ville, arrivent, un à un :
Pogner, le père d'Eva, Beckmesser, un personnage revêche et acariâtre,
Qui aspire à la main d'Eva, puis le fourreur, le ferblantier, l'étameur,
Le boulanger, le marchand d'épices et enfin le cordonnier Sachs.

" Comme chaque année, dit Pogner,
Demain aura lieu notre concours de chant.
Il m'appartient cette fois d'en proposer le premier prix.
Ma fille étant ce que j'ai de plus précieux,
J'offrirai sa main au vainqueur. "

A ces mots, Walther demande à être reçu dans la corporation
Pour pouvoir participer au concours.
Beckmesser, méfiant, regarde le jeune homme, de la tête aux pieds.
" Eh bien ! Chante ! dit-il sèchement.
Je noterai toutes tes infractions aux règles.
Walther attaque d'une voix mélodieuse un hymne à l'amour et au printemps,
Mais il est troublé par le crissement de la craie de Beckmesser,
Qui inscrit chaque faute sur l'ardoise.
Le jeune homme continue hésitant, mais très vite, on l'arrête.
Les maîtres chanteurs refusent de l'écouter davantage.

La veille de la Saint-Jean, peu après le coucher du soleil,
Sachs travaille encore à son établi et repense au chant de Walther.
Il n'était pas vraiment dans les normes, mais il était plein de vie et de passion,
L'amour semblait en être le seul guide.
Il lève les yeux : Eva traverse la rue.

Il aime cette jeune fille qu'il a vue grandir et devenir femme.
Il l'accueille gentiment et bavarde avec elle.
" Beckmesser a toutes les chances de remporter le concours, lui dit-il. "
Eva proteste.
En aucun cas, elle n'épousera ce vieux garçon déplaisant.
Elle préfère encore se marier avec Sachs lui-même, puisqu'il est veuf !
Puis s'effondrant soudain en larmes,
Elle confie à son vieil ami l'amour qu'elle éprouve pour Walther.
Le cordonnier, ému, décide de faire tout son possible
Pour que les deux jeunes gens puissent s'unir.
" Eva ! rentre vite ! dit Magdalene,
Qui vient de traverser la rue pour chercher sa maîtresse.
Monsieur Beckmesser va te donner la sérénade !
- Prends ma place à la fenêtre, répond Eva.
Il n'y verra que du feu et nous allons bien nous amuser ! "

Magdalene, ravie à l'idée de ce petit tour,
Rentre rapidement à la maison.
Au même moment, Walther désespéré arrive et se jette dans les bras d'Eva.
Il lui raconte son échec devant les maîtres chanteurs.
Ne voyant pas d'autre solution, tous deux projettent de s'enfuir.
Beckmesser a commencé sa sérénade.
Mais, à chaque faute commise par le chanteur,
Le cordonnier frappe de vigoureux coups de marteau sur son établi.
Beckmesser chante de plus en plus fort pour couvrir ce tintamarre.
Le spectacle est si drôle que Magdalene à son balcon pouffe de rire.
Une fenêtre s'ouvre, puis une autre…
" Rentre chez toi, vieux séducteur ! crient les voisins. "
David, le fiancé de Magdalene, a lui aussi ouvert sa fenêtre
Et regarde ébahi la jeune femme écouter la sérénade de Beckmesser.
Fou de jalousie, il attrape un gourdin et se précipite dans la rue.

Bientôt, il y a foule dehors.
Personne ne sait pourquoi, mais les hommes s'invectivent et lèvent le poing,
Les femmes crient de terreur,
Les bourgeois en bonnet de nuit se prennent les pieds dans leurs longues chemises.
Pogner, intrigué par ce vacarme, sort à son tour.
Sachs en profite pour pousser Eva dans les bras de son père
Et entraîne Walther au fond de sa boutique.
Beckmesser a réussi à échapper aux coups de David.
Les femmes, de leurs fenêtres, vident des seaux d'eau
Sur les têtes des derniers bagarreurs et la rue retrouve son calme.

Le lendemain matin, Sachs observe le lever du soleil.
Walther a passé la nuit dans la boutique.
Il vient parler à Sachs d'un chant qui lui est venu en rêve.
Le jeune homme entonne une première mesure, un couplet, puis un autre…
Sachs fait quelques commentaires critiques.
" Très bien ! dit-il soudain.
Allons nous préparer pour la fête ! "

En leur absence, Beckmesser, dépité, met le nez à la fenêtre de la boutique.
Voyant qu'il n'y a personne, il entre.
Il est pomponné comme un marié.
Il se penche vers la table et une lueur de colère brille dans ses yeux.
" Le sournois ! marmonne-t-il, en s'emparant du feuillet,
Convaincu qu'il s'agit du texte de la chanson que Sachs présentera le lendemain.
Je comprends maintenant pourquoi il a gâché ma sérénade.
Il veut la main d'Eva ! "
Mais Sachs le surprend et décide de le mettre à l'épreuve.
Il lui fait don du feuillet et l'autorise à l'utiliser lors du concours.
Sur le pré, il y a foule.
Des barques décorées de drapeaux multicolores glissent sur le fleuve.
L'arrivée des maîtres chanteurs en une lente procession est accueillie avec joie.
" Que la fête commence ! dit Sachs d'une voie forte.
Comme chaque année, réjouissons-nous,
En écoutant les plus beaux poèmes des maîtres chanteurs ! "

Il invite Beckmesser à commencer.
Le vieux garçon regarde anxieusement le feuillet
Et éponge la sueur qui coule sur son front.
Il a étudié le poème de Walther avec soin,
Mais il n'en a pas toujours compris le sens.
Chacun se tait.
Tous écoutent.
Beckmesser bafouille et fait des couacs…
Quelques ricanements étouffés, et en un instant,
Tout le monde se tord de rire, puis suivent les huées.
" C'est lui, ce maudit cordonnier, l'auteur du chant dont vous vous moquez ! "
Une rumeur d'étonnement court dans la foule.
" C'est vrai, dit Sachs.
J'ai noté ce poème sur ce papier, mais je n'en suis pas l'auteur.
Si la mélodie était appropriée, vous verriez que ce chant était d'une grande beauté ! "
Il fait alors signe à Walther de monter sur l'estrade.
Le jeune homme chante avec sentiment, en regardant Eva.
Il ajoute de nouvelles strophes au gré de son imagination.
La mélodie jaillit du plus profond de son cœur.
" C'est un chant audacieux et inhabituel, mais véridique et beau, chuchotent les maîtres. "
La foule, elle, ne cache pas son enthousiasme.
Walther a gagné tous les suffrages.
Sachs s'avance alors pour le décorer de l'insigne des maîtres chanteurs.
" Votre talent vous a donné le droit d'être l'un des nôtres.
Ne refusez pas cet honneur ! dit-il voyant le jeune homme hésiter.
Il n'y a pas que la règle, il y a aussi l'Art
Et les maîtres chanteurs savent toujours le reconnaître. "
Walther accepte alors l'insigne
Et, radieux, prend la main d'Eva.
Celle-ci le couronne, puis dépose la guirlande sur la tête de Hans Sachs,
Qui avec le peuple tout entier, élève un hymne à l'art allemand.
(D'après Les plus beaux contes de la musique, Gründ)

Télécharger le texte

 

Analyse en attente