Neith, l'archère, mère de l'univers

(mythe égyptien)




Neith, la mère de Rê

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Neith, l'archère, mère de l'univers

Le père des pères, la mère des mères, l'être divin qui commença d'être au commencement existait au cœur du Nouou, issue d'elle-même, alors que la terre était encore dans les ténèbres et que nulle plante ne croissait. Elle prit d'abord la forme d'une vache que nulle divinité, en quelque lieu que ce soit, ne pouvait connaître ; puis elle se transforma en poissons-lates. Alors elle se mit en chemin.

Elle éclaira le regard de ses yeux et la lumière fut. Elle dit alors : " Que ce lieu où je suis devienne pour moi un sol au cœur du Nouou, afin que je puisse m'y tenir ". Et ce lieu où était Neith devint alors un sol au cœur du Nouou, selon les paroles qu'elle avait proférées. Il devint la " terre des eaux " et alors apparut Per-Neter et Pe. Elle dit encore : " Agréable est la saveur de cette butte " ; et Dep apparut, et " Terre d'agrément " fut désormais le nom de Saïs.

Ainsi tout ce que son cœur contenait, venait aussitôt à l'existence. Ayant ressenti de la douceur sur cette butte, l'Egypte apparut dans l'allégresse.

Elle façonna ainsi trente dieux, en prononçant leurs noms, l'un après l'autre, et elle fut joyeuse après les avoir vus. Ils dirent : " Sois bénie, ô la maîtresse des dieux, notre mère, qui nous as fait venir à l'existence. Tu as fait nos noms, alors que nous étions encore sans conscience, tu as séparé pour nous le jour de la nuit. Tu as fait pour nous une terre sur laquelle nous pouvons nous tenir ; tu as séparé pour nous la nuit du jour. Combien efficace, oh ! combien efficace est tout ce qui sort de ton cœur à toi, oh ! l'Unique, venue à l'existence au commencement. Le temps éternel et le temps infini passent devant ton visage.

Elle dit alors à ses enfants : " Allons, dressons-nous en ce lieu, qui est devenu un sol sur lequel nous pouvons nous tenir, afin de repousser notre lassitude. Puis nous naviguerons vers ce lieu sacré, Esna-Saïs, cette terre au cœur du Nouou, cette butte d'agrément où nous résiderons ". Elle étendit donc un sol au cœur du Nouou, et lui donna le nom de " Haute Terre ".

Les dieux dirent alors à la Grande, la Puissante : " Ô toi qui nous a mis au monde, toi de qui nous sommes issus, fais que nous connaissions ce qui n'a pas encore pris naissance, car, vois, la butte est isolée et nous ignorons ce qui doit encore venir à l'existence ". Neith répondit : " Je vais vous faire connaître ce qui bientôt doit apparaître. Evoquons encore quatre propos bénéfiques, rendons clair ce qui est dans nos corps, prononçons à haute voix ce qui est sur nos lèvres, ainsi aujourd'hui même nous aurons connaissance de tout ". Ils firent tout ce qu'elle avait dit et la huitième heure arriva en un court instant.

La vache ahet médita alors sur ce qui devait venir à l'existence ; elle dit : " Un dieu auguste va apparaître aujourd'hui. Lorsqu'il ouvrira son œil, la lumière sera ; quand il le fermera, les ténèbres se manifesteront. Les hommes naîtront des larmes de son œil, et les dieux de la salive de ses lèvres. Je le rendrai fort au moyen de ma force, je le rendrai éclatant grâce à mon éclat, je le rendrai puissant par ma puissance. Ses enfants se révolteront contre lui, mais ils seront abattus pour lui, ils seront frappés pour lui. Car c'est mon enfant, issu de mon corps, et il sera roi de ce pays pour le temps infini. Je le protégerai dans l'étreinte de mes bras de sorte qu'aucun mal ne pourra l'atteindre. Je vais vous dire son nom : il sera Khepri à l'aube, Atoum, le soir, et il sera le dieu rayonnant pour le temps infini, en ce sien nom de Rê, chaque jour ".

Les dieux dirent : " Tu évoques des choses que nous ignorons parmi celles que nous entendons ". Alors Khemenou devint le nom de ces dieux et il devint également celui de cette ville.

Alors ce grand dieu se dressa hors des excrétions sorties de la chair de Neith et qu'elle avait placées à l'intérieur du cœur d'un œuf. Lorsque celui-ci creva le Nouou, survint la montée des eaux, en un lieu unique ; de la semence tomba sur l'œuf alors que le Nouou brisait la coquille qui se trouvait autour de ce grand dieu sacré. C'était Rê, qui s'était caché au sein du Nouou en ce sien nom d'Amon, et qui devait façonner les dieux et les déesses au moyen de ses rayons en ce sien nom de Khnoum.

Sa mère, la déesse-vache, s'exclama à grands cris : " Viens, viens, toi que j'ai créé ! Viens, viens, toi que j'ai mis au monde ! Viens, viens, toi que j'ai amené à l'existence ! Je suis ta mère, la vache ahet ". Ce dieu vint alors, souriant, les bras ouverts, vers cette déesse ; il se jeta à son cou (sic), ce que fait d'habitude un fils à l'égard de sa mère. Et ce jour devint le beau jour du début de l'année.

Puis Rê pleura dans le Nouou lorsqu'il ne vit plus sa mère, la vache ahet, et les hommes vinrent à l'existence à partir de ses larmes. Il saliva après qu'il l'eut revue et les dieux vinrent au monde à partir de la salive de ses lèvres.

Ces dieux antérieurs reposent maintenant dans leur naos. Ils avaient été appelés après que cette déesse les eut pensés. Ils protègent Rê, désormais, à l'intérieur de la cabine de la barque solaire, ils prodiguent à ce dieu la louange par acclamations et disent : " Bienvenue, bienvenue à toi, héritier de Neith, qu'elle a fait de ses mains et créé en son cœur. Tu est le roi de ce pays pour le temps infini, ainsi que ta mère l'avait prédit ".

Ces dieux antérieurs chassèrent toutefois un crachat de la bouche de Neith, un crachat qu'elle avait produit dans le Nouou. Alors il devint un serpent de cent vingt coudées, qui fut appelé Apophis. Son cœur conçut la rébellion contre Rê avec ses congénères issus de son œil.

Puis Thoth sortit du cœur de Rê, en un moment de tristesse, ce qui lui valut son nom de Thoth. Il s'entretint avec son père, qui le dépêcha contre la révolte, en qualité de possesseur de la Parole divine. Ainsi vinrent à l'existence en ce lieu, Thoth, seigneur d'Hermopolis et les huit dieux du premier des Collèges divins.

Neith dit alors à son fils : " Viens avec moi vers Esna-Saïs, ce sol fameux au cœur du Nouou. Je prononcerai ton nom en ta ville, et on ne cessera plus de l'entendre, chaque jour. Je t'allaiterai pour que ta force soit grande, pour rendre plus importante encore la crainte que tu inspires, afin que tu puisses détruire ceux qui se rebelleraient contre toi ".

Ainsi sept propos étaient sortis de la bouche de Neith. Ils devinrent sept dieux ; ainsi ce qu'elle avait dit devint le nom des Propos, le nom de la Parole divine et également le nom de Saïs. Ainsi naquirent les sept Propos-dieux de Methyer, qui furent désormais la protection de Methyer en tout lieu où elle se rendait. Alors elle se transforma en vache ahet ; elle plaça Rê entre ses cornes et elle nagea en le portant ; les dieux dirent : " C'est la Grande Nageuse avec son fils " ; de là vient le nom de Methyer.

Elle passa une durée de temps de quatre mois dans les cités du Sud, que l'on appelle " la proue du pays ", repoussant les rebelles qui s'étaient avancés par haine de sa Majesté. Une flamme brillait devant elle en Haute comme en Basse Egypte.

Lorsqu'elle arriva à Saïs, au soir du troisième mois de la saison sèche, le treizième jour, ce fut une belle et grande fête dans le ciel, sur la terre et en tous pays. Alors elle modifia sa forme et devint la déesse Oureret ; elle saisit son arc en sa main, sa flèche en son poing, et elle s'établit dans le temple de Neith avec son fils Rê.

Rê dit alors aux dieux qui étaient avec lui : " Accueillez Neith en ce jour ; venez pour elle faire la liesse en ce beau jour, car elle m'a amené sain et sauf. Allumez les torches devant elle ! Faites la fête en sa présence jusqu'à ce que vienne l'aube ".
(Textes sacrés et textes profanes de l'ancienne Egypte II, traductions et commentaires par Claire Lalouette, Connaissance de l'Orient, Gallimard)

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Analyse de Neith, l'archère, mère de l'univers